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Peuplement, mobilité et développement dans un milieu défavorisé : le cas de la région des Savanes au Togo

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Diagnostic régional

Si la région peut être vue comme un milieu géographiquement défavorisé, elle est cependant loin d’avoir atteint les limites de la capacité de ses terres à nourrir adéquatement sa population et à assurer des conditions de vie décentes à ses agriculteurs. La déstabilisation du système de production agricole qu’on y observe et dont les répercussions sur les conditions de vie des ménages exploitants ne cessent de s’amplifier, serait imputable à cinq facteurs : 1) un contexte géo-climatique qui handicape l’amélioration des productivités agricoles ; 2) une forte inégalité du potentiel productif entre les localités constitutives de la région ; 3) une atomisation excessive des terres cultivées du fait du mode de dévolution foncière et leur inégale répartition entre les grands groupes ethniques ; 4) une réduction considérable de l’espace agricole susceptible d’être viabilisé du fait de l’extension des réserves de faune et de flore ; 5) une fécondité élevée qui plombe les charges de subsistance économique des ménages agricoles et nuit à l’amélioration de leurs conditions de vie.

Sur quels leviers agir pour réduire la pauvreté des ménages agricoles dans la région ?

Trois facteurs influencent de façon significative la production agricole de la région : foncier, technologique et démographique.

Pour le facteur foncier, les analyses de régression ont montré qu’il existe un lien statistique significatif entre les variables ayant trait au foncier et l’activité agricole. Entre autres résultats, il en ressort que les tailles d’exploitation les plus grandes sont préférentiellement et significativement associées aux zones de densité agraire faible et réciproquement et que les bonnes terres arables sont plus fortement associées aux zones de faible densité qu’aux zones de densité élevée.

Au plan technologique, il existe une association significative entre les variables « utilisation d’engrais » et « densité agraire du milieu de culture ». Ainsi, à superficies égales, les exploitations localisées dans les zones de forte densité recourraient plus à l’utilisation d’engrais (39,1%) que celles des zones de faibles densités (13,7%). Cependant, pour les autres variables de la sphère technologique, il ne semble pas se dégager un effet significatif sur la production agricole. Ainsi, ni l’appartenance à un groupement agricole, ni l’accès au crédit agricole, ni l’utilisation de l’attelage ne semblent déterminants pour la production agricole.

Les variables démographiques ont globalement un lien faible avec l’activité agricole selon la zone de culture. Autrement dit, ces variables sont les moins différenciées selon la zone de densité. Seule la variable « Ethnie » semble distinguer les deux zones de culture.

On constate donc que l’augmentation des rendements agricoles dans la région des Savanes est principalement influencée par les paramètres fonciers et les paramètres technologiques et dans une mesure nettement moindre, par les paramètres démographiques. L’influence exercée par les deux premiers paramètres est d’autant plus grande que le sens et la significativité de l’effet exercé se confirment dans chacune des deux sous-régions agricoles étudiées mais de façon un peu plus prononcée dans les zones de densités faibles.

Pour l’ensemble des résultats obtenus, les constats suivants se dégagent. Dans les zones de fortes densités, la pression démographique sur les terres est telle que l’accroissement de la productivité ne passe plus par le facteur foncier mais davantage à travers les paramètres technologiques. Cette pression agissante, qui se traduit par une abondance relative de la main-d’oeuvre par rapport à la terre, déséquilibre le jeu des combinaisons optimales et force les agriculteurs à réaliser leur production de façon sub-optimale.

A l’opposé, dans les zones faiblement peuplées où la terre n’a pas encore atteint ses limites, un accroissement du volume de main-d’oeuvre contribue à faire augmenter les rendements agricoles.

Comment ces réalités agricoles affectent-elles les conditions de vie des ménages exploitants ?

Les résultats relatifs à l’influence des facteurs de production sur les rendements agricoles et les conditions de vie des exploitants indiquent que :

1) Si l’effet des paramètres fonciers, technologiques et démographiques sur les productivités agricoles se révèle globalement significatif, les paramètres démographiques sont ceux dont la contribution à la variation des rendements agricoles reste la plus faible et ce, quelle que soit la zone de densité considérée.

2) Dans les zones à forte densité de population, non seulement le facteur terre est relativement « rare », mais la dynamique de reproduction des exploitants agricoles est demeurée à un niveau élevé (l’ISF est estimé à 6,3 enfants par femme en 2003). Aussi, face aux difficultés d’extension des surfaces cultivées et d’accessibilité aux techniques d’intensification dans ces zones, le rapport entre ressources et population à l’intérieur des ménages, mesuré par le revenu annuel par membre, ne pouvait théoriquement déboucher que sur une détérioration des capacités de subsistance. Les résultats obtenus révèlent à ce sujet que plus de 65% des ménages agricoles opérant dans ces zones ont un revenu annuel par membre nettement faible et que dans un ménage sur deux, le niveau de l’indice est si bas qu’il n’est pas exagéré de qualifier ces ménages d’indigents.

3) Dans les zones à densité de population plus modérée, les productions agricoles connaissent un meilleur rendement. Le niveau relativement élevé de la productivité agricole dans ces zones se traduit par une précarité économique moindre. Un peu plus du tiers des ménages agricoles de ces zones expérimentent en effet des conditions de vie que l’on peut qualifier de décentes par comparaison avec les conditions de vie dans les zones densément peuplées.